LES DIFFERENCES ENTRE BAIL COMMERCIAL ET BAIL PROFESSIONNEL

Le régime des baux commerciaux a été modifié par la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008.
Pour les locataires, elle ouvre la possibilité de l’installation d’une activité professionnelle ou commerciale dans les locaux. La loi autorise donc les parties qui relèvent en principe des baux professionnels à se placer conventionnellement sous le régime des baux commerciaux.
L’article L145-2 du Code de commerce, qui fixe le champ d’application du statut des baux commerciaux, permet désormais d’adopter ce statut pour les baux d’un local « affecté à un usage exclusivement professionnel ».
Cela permet dorénavant aux cabinets d’avocats ou de médecins de conclure un bail commercial.

LE BAIL COMMERCIAL

Texte essentiel :
Décret du 30 septembre 1953 codifié dans le Code de commerce, articles L145-1à L145-60 et R145-1 à R145-33.

Champ d’application :

  • Locaux dans lesquels un fonds est exploité par un commerçant ou un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés ou un chef d’entreprise immatriculé au répertoire des métiers (artisan).
  • Locaux ou immeubles accessoires à l’exploitation d’un fonds de commerce quand leur privation est de nature à compromettre l’exploitation du fonds et qu’ils appartiennent au propriétaire du local ou de l’immeuble où est situé l’établissement principal.
  • Terrains nus sur lesquels ont été édifiés (avant ou après le bail) des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal.
  • Locaux ou immeubles abritant des établissements d’enseignement.
  • Baux consentis aux communes pour des immeubles ou des locaux affectés, soit au moment de la location, soit ultérieurement et avec le consentement exprès ou tacite du propriétaire, à des services exploités en régie.
  • Immeubles nécessaires à la poursuite de l’activité des entreprises publiques et établissements publics à caractère industriel ou commercial, dans les limites définies par les lois et règlements qui les régissent et à condition que ces baux ne comportent aucune emprise sur le domaine public.
  • Sous réserve des dispositions de l’article L145-26 aux baux des locaux ou immeubles appartenant à l’État, aux collectivités territoriales et aux établissements publics, dans le cas où ces locaux ou immeuble satisfont aux dispositions de l’article L145-1 ou aux 1° et 2° ci-dessus.
  • Baux d’immeubles abritant soit des sociétés coopératives ayant la forme commerciale ou un objet commercial, soit des sociétés coopératives de crédit, soit des caisses d’épargne et de prévoyance.
  • Locaux loués à des artistes admis à cotiser à la caisse de sécurité sociale de la maison des artistes et reconnus auteurs d’oeuvres graphiques et plastiques, tel que définis par l’article 98A de l’annexe III du Code général des impôts.
  • Aux baux d’un local affecté à un usage exclusivement professionnel si les parties ont conventionnellement adopté ce régime.

Exclusion :

  • Les autorisations d’occupation précaire accordées par l’administration sur un immeuble acquis par elle à la suite d’une déclaration d’utilité publique.
  • Les baux emphytéotiques, sauf en ce qui concerne la révision du loyer.
  • Les baux de moins de 24 mois (article L145-5 du code de commerce).

Usage mixte :
Oui pour une habitation ou un bail rural.

Durée minimum :
9 ans

Fixation du loyer :
Libre

Indice :
Au choix : Indice du coût de la construction ou bien indice des loyers commerciaux (ILC).
Bon à savoir : dans certains cas, il n’est pas possible de choisir et l’indice du coût de la construction reste obligatoire (enseignement, service en régie des communes, professionnels libéraux, bureaux, plateforme logistique, activité industrielle).

Révision du loyer :
Révision triennale plafonnée en fonction de la variation de l’indice trimestriel du coût de la construction ou fixée à la valeur locative si la preuve d’une modification matérielle de facteurs locaux de commercialité ayant entraîné une variation de plus de 10 % de la valeur locative est rapportée.
Clause d’indexation : le loyer est révisé suivant une fréquence prévue dans le contrat (en général tous les ans).
Introduction d’une « clause recette ».
Dans les baux commerciaux, le loyer de renouvellement est « plafonné » : une fixation à la valeur locative ne peut être envisagée que s’il existe une cause de déplafonnement (article L145-34 du Code de commerce). Les parties peuvent cependant fixer par avance par une clause contractuelle les conditions de fixation du prix du bail renouvelé.

Fin du bail à l’initiative du locataire :
Le locataire bénéficie d’un bail de longue durée dont le renouvellement sera garanti sous certaines conditions, les hausses de loyer étant limitées par les mécanismes modérateurs prévus par la loi.
Mais le locataire ne pourra en principe donner congé seulement tous les 3 ans et 6 mois à l’avance par acte d’huissier (sauf clause contraire prévue au bail).
En l’absence de clause contraire, le locataire ayant opté pour le statut des baux commerciaux ne pourra quitter les lieux que tous les trois ans en respectant un certain formalisme.

Fin du bail à l’initiative du bailleur :
En cours de bail commercial, le bailleur peut délivrer congé exceptionnellement dans des cas strictement limités par la loi : afin de construire, de surélever l’immeuble existant ou d’exécuter des travaux prescrits ou autorisés dans le cadre d’une opération de restauration immobilière.

Résiliation :
Dans le cadre d’un bail commercial, la clause résolutoire de plein droit est réglementée : possibilité d’obtenir des délais (article L145-41 à L145-45 du Code de commerce).

Renouvellement du bail :
Le renouvellement du bail intervient sur demande du locataire ou après congé du bailleur avec offre de renouvellement. Ce renouvellement n’est pas automatique : il peut toujours être refusé.
Le loyer du bail renouvelé est en principe « plafonné ». Une fixation à la valeur locative est possible lorsqu’il existe des causes de déplafonnement.
Les conditions financières du renouvellement peuvent être fixées conventionnellement.

Dans un bail commercial, il existe 4 hypothèses de refus de renouvellement :

  • refus possible sans indemnité dans des cas limité : pour motifs graves et légitimes ou immeubles insalubres ou dangereux, ou reprise pour habiter
  • refus de renouvellement possible dans des cas limités moyennant le paiement d’une indemnité d’éviction : reprise pour surélever, pour travaux, pour construire un logement
  • refus possible dans tous les cas moyennant le paiement d’une indemnité d’éviction
  • reprise possible des locaux d’habitation

Sous location :
En principe toute sous location totale ou partielle est prohibée, sauf stipulation contraire du bail ou accord du bailleur (article L145-31 du Code de commerce).

LE BAIL PROFESSIONNEL

Texte essentiel :
Article 57A de la loi du 23 décembre 1986.

Champ d’application :
Le bail à usage exclusivement professionnel est donné à la personne qui exerce une profession dans les lieux loués. Le champ d’application se définit par distinction avec les autres usages professionnels qui relèvent de statuts spéciaux.

  • Professionnel non commerçant : activités juridiques, médicales, paramédicales, architectes, géomètres, ingénieurs conseils, bureaux d’études, agents d’assurance, comptables, professeurs à domicile (sauf s’ils exploitent un « établissement d’enseignement »), entraineurs et éleveurs de chevaux, centres équestres, garde d’enfants, ouvriers à domicile, activité de conseil en stratégie et organisation …
  • Personne morale qui exerce effectivement une activité professionnelle.
  • Les associations qui exercent une activité lucrative de manière habituelle (exemple association de cours d’art dramatique organisant des spectacles et dont l’essentiel des revenus proviennent des spectacles).

Exclusion :

  • Les activités artistiques lorsqu’il y a cotisation à la caisse de sécurité sociale de la maison des artistes et reconnus auteurs d’œuvres graphiques.
  • Conseil en stratégie et organisation
  • Association culturelle
  • Les établissements publics.

Usage mixte :
Oui pour une habitation principale et professionnelle (article 14 de la loi du 6 juillet 1989).

Durée minimum :
6 ans

Loyer :
Libre

Indice :
Indice du coût de la construction et prochainement (au choix) l’indice des loyers d’activité tertiaire (ILAT) créé par la loi 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification du droit.

Révision du loyer :
Le principe étant la liberté des parties, le loyer sera révisé si les parties l’ont prévu et selon les modalités convenues. A défaut de clause de révision, le loyer reste fixe pendant toute la durée du bail.
En cas de renouvellement du bail professionnel, il n’existe aucune règle qui réglemente la fixation du nouveau loyer. Le bailleur n’est d’ailleurs pas tenu au renouvellement du bail et peut congédier librement le locataire. Il est donc « maître du jeu » et peut donc subordonner le renouvellement du bail au montant du loyer qu’il peut décider seul de fixer.

Fin du bail à l’initiative du locataire :
Le locataire peut donner congé à tout moment moyennant un préavis de 6 mois.

Fin du bail à l’initiative du bailleur :
En cours de bail professionnel, le bailleur ne peut délivrer congé à son locataire.

Résiliation :
Dans le cadre d’un bail commercial, la clause résolutoire de plein droit est réglementée : possibilité d’obtenir des délais (article L145-41 à L145-45 du Code de commerce).

Renouvellement du bail :
Le renouvellement est toujours facultatif pour le bailleur qui peut subordonner ce renouvellement aux conditions qu’il souhaite (en particulier de loyer).
En l’absence de refus de renouvellement signifié 6 mois avant la fin du bail, le bail est reconduit aux mêmes conditions et pour la même durée.
Le bailleur est libre de refuser le renouvellement sans avoir à donner des motifs, et, sans avoir à indemniser le locataire.

Sous-location :
C’est la liberté des conventions. En l’absence de clause contraire, la sous-location est libre.

EN RÉSUMÉ, QUEL BILAN ?

Concernant le locataire :
Si la préoccupation du locataire est la stabilité, le statut des baux commerciaux est plus avantageux.
Si en revanche, sa préoccupation est de pouvoir quitter les lieux à sa guise en cours de bail, tout en étant protégé contre le risque de reprise des locaux par le bailleur, le statut des baux professionnels paraît plus adapté.
Le choix des statuts commerciaux ou professionnels dépendra des priorités et objectifs poursuivis par les parties.
Dans le bail professionnel, le locataire n’a aucune assurance quant à la reconduction ou le renouvellement de son bail : le bailleur peut l’évincer librement.
Dans le bail commercial, le bailleur dispose de multiples possibilités d’éviction du locataire mais cette éviction est encadrée et ne peut intervenir que dans les cas fixés par la loi. De surcroît cette éviction implique le versement d’une indemnité d’éviction.

Concernant le bailleur :
Si la préoccupation du bailleur est la stabilité, comme cela est souvent le cas, afin d’éviter une rotation excessive de ses locataires, le statut des baux commerciaux paraît plus adapté.
En effet, le bail professionnel comporte un risque d’instabilité dans la mesure où le locataire peut quitter les lieux à tout moment en cours de bail moyennant un préavis de 6 mois.

Pour aller plus loin :
Notre rubrique bail commercial
Notre rubrique bail professionnel